Bonjour, ma chère amie !*
Cela fait bien longtemps que je ne t'ai pas parlé et j'ai pensé que je devais mettre un terme à notre phase de « manque de correspondance ». Comment vas-tu ? Je sais que tu as déménagé loin de la ville de ton enfance ! Je ne puis que t'en féliciter. Je me réjouis toutefois énormément pour toi.
Moi aussi, j'ai dû quitter ma ville natale pour avoir une vie meilleure et essayer d’établir ma réputation. Je sais que les choses sont parfois pénibles et que l'on se sent seul, mais toutes les décisions que l'on prend sont motivées par la promesse d'une vie plus agréable. J'ai un excellent conseil à te donner : si un jour tu sens que la corde invisible qui te lie à ta ville natale est en train de se rompre, essaie de te rappeler des moments de ton enfance que tu as passés là-bas. Voilà… J'aimerais vraiment te faire découvrir ma ville natale, en espérant que tu me parleras également de la tienne.
La Russie est un pays que tu connais bien, puisque tu as déjà visité quelques-unes de ses villes. Mais en réalité, à mon avis, ce sont toutes les petites villes et tous les villages qui contribuent à forger l'âme d'une nation. Je suis moi-même originaire d'une de ces petites villes, il est donc logique que je croie à cette idée. Un peu narcissique, non ? Bien, je vais commencer mon histoire.
Je suis née et j'ai vécu toute mon enfance dans une petite ville appelée Plastoun. Elle se trouve au nord du kraï de Primorié. Tu sais ce qui est le plus étonnant à propos de cet endroit ? Il se trouve à proximité de la réserve naturelle de Sikhote-Alin ! Lorsque j'étais à l'école, je l'ai visitée plusieurs fois et j'ai été très impressionnée. Pour moi, Plastoun est fortement associé à l'été et au début de l'automne, car c'était toujours le moment où je pouvais flâner dans les rues silencieuses de ma ville natale et ne pas penser à tout ce qui me dérangeait habituellement lorsque j'étais à l'école.
L'été à Plastoun est également lié aux souvenirs de l'exploration de la nature avec mes amis. Oh, comme il est émouvant de réfléchir à ces souvenirs, et comme il est inspirant de se rappeler de toutes les beautés de la côte de la mer du Japon, même si la nature y est parfois destructrice. Cette nature est partout dans ma ville natale. A côté de ma maison, il y a une petite rivière et, de ma chambre, j'ai toujours pu contempler la mer et ses changements. Ces souvenirs m'apportent la paix, cette sorte de paix que rien dans ce monde ne peut me donner.
La rivière était si belle et avait un débit si fort que mes amis et moi y venions tous les week-ends pour jouer à faire semblant. Un jour nous étions de célèbres marins occupés à conquérir de nouvelles terres, et le lendemain nous étions des vagabonds essayant de trouver une sorte de dieu à vénérer dans la forêt. Cette image de la rivière reste constante dans mon imaginaire. Mais tout ce qui est bon à une fin, dit-on. Aujourd'hui, la rivière ne ressemble plus à celle de mes souvenirs d'enfance. Toute cette petite oasis, où nous pouvions être qui nous voulions, a été détruite par la nature elle-même. Une bonne métaphore, en fait : une fois que l'enfance est finie, rien ne reste comme avant. Mais c'est la beauté de toute chose : elle change.
La mer, oh, que j'aime la mer ! Avoir grandi et avoir ressenti beaucoup d'émotions au bord de la mer rend impossible de vivre ailleurs. Vraiment, je ne pense pas que je serais moi-même si je déménageais dans un endroit où je ne peux pas parcourir la côte. La mer de mon enfance est celle que je voyais tous les jours en regardant par la fenêtre. C'est elle qui a été témoin de ma première étoile filante et de mon premier vœu. C'est cette mer et ses baies qui ont accompagné mon dernier mois de septembre à l'école, et qui m'ont salué au moment où je partais pour commencer une nouvelle vie. Ironiquement, la vie était nouvelle, mais la mer était toujours la même, j'avais juste changé de côte. Cette mer, celle au bord de laquelle j'ai grandi, me salue encore aujourd'hui et me laisse partir chaque année. Dans mes souvenirs, la mer que je voyais de ma fenêtre sera toujours incroyablement bleue et chaude, même si aujourd'hui je la vois couverte de glace et de neige.
Ma ville natale n'est pas seulement un lieu. C'est un souvenir, un sentiment oublié depuis longtemps, celui d'appartenir à quelque chose sans avoir à le prouver. Même si je n'aime pas beaucoup cet endroit, j'aime les souvenirs et les expériences qu'il m'a offerts.
En tout cas, tu sais, on peut faire de n'importe quel endroit notre maison. Ce qui compte, c'est d'y être heureux.
Eh bien, tu connais maintenant une petite partie de mon âme. Si tu te sens à l'aise, j'aimerais bien connaître la tienne.
Alors, chère amie, sois heureuse et profite de ta nouvelle vie !
Je t'aime, Julie
Cela fait bien longtemps que je ne t'ai pas parlé et j'ai pensé que je devais mettre un terme à notre phase de « manque de correspondance ». Comment vas-tu ? Je sais que tu as déménagé loin de la ville de ton enfance ! Je ne puis que t'en féliciter. Je me réjouis toutefois énormément pour toi.
Moi aussi, j'ai dû quitter ma ville natale pour avoir une vie meilleure et essayer d’établir ma réputation. Je sais que les choses sont parfois pénibles et que l'on se sent seul, mais toutes les décisions que l'on prend sont motivées par la promesse d'une vie plus agréable. J'ai un excellent conseil à te donner : si un jour tu sens que la corde invisible qui te lie à ta ville natale est en train de se rompre, essaie de te rappeler des moments de ton enfance que tu as passés là-bas. Voilà… J'aimerais vraiment te faire découvrir ma ville natale, en espérant que tu me parleras également de la tienne.
La Russie est un pays que tu connais bien, puisque tu as déjà visité quelques-unes de ses villes. Mais en réalité, à mon avis, ce sont toutes les petites villes et tous les villages qui contribuent à forger l'âme d'une nation. Je suis moi-même originaire d'une de ces petites villes, il est donc logique que je croie à cette idée. Un peu narcissique, non ? Bien, je vais commencer mon histoire.
Je suis née et j'ai vécu toute mon enfance dans une petite ville appelée Plastoun. Elle se trouve au nord du kraï de Primorié. Tu sais ce qui est le plus étonnant à propos de cet endroit ? Il se trouve à proximité de la réserve naturelle de Sikhote-Alin ! Lorsque j'étais à l'école, je l'ai visitée plusieurs fois et j'ai été très impressionnée. Pour moi, Plastoun est fortement associé à l'été et au début de l'automne, car c'était toujours le moment où je pouvais flâner dans les rues silencieuses de ma ville natale et ne pas penser à tout ce qui me dérangeait habituellement lorsque j'étais à l'école.
L'été à Plastoun est également lié aux souvenirs de l'exploration de la nature avec mes amis. Oh, comme il est émouvant de réfléchir à ces souvenirs, et comme il est inspirant de se rappeler de toutes les beautés de la côte de la mer du Japon, même si la nature y est parfois destructrice. Cette nature est partout dans ma ville natale. A côté de ma maison, il y a une petite rivière et, de ma chambre, j'ai toujours pu contempler la mer et ses changements. Ces souvenirs m'apportent la paix, cette sorte de paix que rien dans ce monde ne peut me donner.
La rivière était si belle et avait un débit si fort que mes amis et moi y venions tous les week-ends pour jouer à faire semblant. Un jour nous étions de célèbres marins occupés à conquérir de nouvelles terres, et le lendemain nous étions des vagabonds essayant de trouver une sorte de dieu à vénérer dans la forêt. Cette image de la rivière reste constante dans mon imaginaire. Mais tout ce qui est bon à une fin, dit-on. Aujourd'hui, la rivière ne ressemble plus à celle de mes souvenirs d'enfance. Toute cette petite oasis, où nous pouvions être qui nous voulions, a été détruite par la nature elle-même. Une bonne métaphore, en fait : une fois que l'enfance est finie, rien ne reste comme avant. Mais c'est la beauté de toute chose : elle change.
La mer, oh, que j'aime la mer ! Avoir grandi et avoir ressenti beaucoup d'émotions au bord de la mer rend impossible de vivre ailleurs. Vraiment, je ne pense pas que je serais moi-même si je déménageais dans un endroit où je ne peux pas parcourir la côte. La mer de mon enfance est celle que je voyais tous les jours en regardant par la fenêtre. C'est elle qui a été témoin de ma première étoile filante et de mon premier vœu. C'est cette mer et ses baies qui ont accompagné mon dernier mois de septembre à l'école, et qui m'ont salué au moment où je partais pour commencer une nouvelle vie. Ironiquement, la vie était nouvelle, mais la mer était toujours la même, j'avais juste changé de côte. Cette mer, celle au bord de laquelle j'ai grandi, me salue encore aujourd'hui et me laisse partir chaque année. Dans mes souvenirs, la mer que je voyais de ma fenêtre sera toujours incroyablement bleue et chaude, même si aujourd'hui je la vois couverte de glace et de neige.
Ma ville natale n'est pas seulement un lieu. C'est un souvenir, un sentiment oublié depuis longtemps, celui d'appartenir à quelque chose sans avoir à le prouver. Même si je n'aime pas beaucoup cet endroit, j'aime les souvenirs et les expériences qu'il m'a offerts.
En tout cas, tu sais, on peut faire de n'importe quel endroit notre maison. Ce qui compte, c'est d'y être heureux.
Eh bien, tu connais maintenant une petite partie de mon âme. Si tu te sens à l'aise, j'aimerais bien connaître la tienne.
Alors, chère amie, sois heureuse et profite de ta nouvelle vie !
Je t'aime, Julie
* Cette lettre est lauréat du concours organisé
par l'Alliance française Vladivostok
dans le cadre des manifestations de la Francophonie 2023