Salut! Ça va?

Le bon goût a droit de Cité Sur la « Cité gastronomique » de Dijon

2022-04

Dijon va bientôt rayonner de mille feux, et les projecteurs médiatiques vont ajouter à sa lumière dans quelques semaines. Ceci pour la bonne cause. En effet, c’est le 6 mai 2022 que la Cité de la Gastronomie va ouvrir ses portes, après des années de chantier, de préparatifs, d’attente impatiente ou résignée.


Les jaloux pourraient (se) demander : « pourquoi ceci à Dijon, plutôt qu’ailleurs ? ». Prenons ici le ton d’une « Défense et illustration du bien manger en terre bourguignonne », et plus précisément en sa capitale.

Le terme « gastronomie », stricto sensu, est peu ragoûtant. Un préfixe assez maladif, quand on y pense ! Et en effet, cela renvoie au grec à « la loi du ventre ». Certes. « Se faire un gastro », ce n’est pas « faire une gastro » ! Mais bientôt, la culture prend le relais de la nature, et là… ! Explosion de sens, fête des papilles et des yeux, estomacs et cœurs en liesse, hommes, âmes et femmes à la fête de concert, fête de ce qui incorporé et par une mystérieuse alchimie, fait corps et fait lien.

Plus largement, cela nous rappelle aussi que cette cuisine possède des résonances culturelles et même civilisationnelles. C’est là qu’on rencontre sa pleine dimension anthropologique, outrepassant la surface biologique et fonctionnelle de ces plats qui ne le sont jamais, plats, tant ils racontent des histoires, transmettent des traditions, rassemblent des communautés de goûts.

Gastronomie et Dijon, une histoire liée. On égrène une heureuse liste, du cassis au bœuf bourguignon, de la moutarde aux œufs en meurette, du pain d’épices aux nonettes et jusqu’à des chapelets de fromages blancs et blonds, crémeux toujours, tristes jamais. Bien sûr, on pourrait aussi évoquer les vins de Bourgogne, voyant les plus grands crus de la planète être égrenés sur une route mythique, qui en quelques dizaines de kilomètres, réunit des étiquettes de légende et réussit un strike parfait.

La terre de Bourgogne est opulente, sa gastronomie généreuse, invitant à l’hédonisme, incitant à l’épicurisme, exigeant lenteur et hauteur, là où l’air du temps incline à l’urgence et à la superficialité.
Dijon, terre de banquets, de festins, d’agapes et de bombances, mérite cette couronne bien plus que d’autres villes, honorant la table certes, mais de manière moins symphonique et historique.

La consécration par l’Unesco du repas gastronomique français au Patrimoine mondial immatériel il y a une dizaine d’années, ainsi que le classement au même rang des « Climats de Bourgogne » confirment la suprématie, assoit la légitimité de Dijon.
La gastronomie est un patrimoine, mais un patrimoine vivant, ouvert, dont le musée est l’assiette, et le conservatoire la table.
La gastronomie est cette étonnante alchimie consistante « à transformer de la matière en bonheur » (Guy Savoy). Elle est à la pointe de nouveau (après tellement d’expérimentations culinaires hasardeuses…), éclatante consécration de cette vague de fond, réhabilitant la cuisine pour en faire un « fait social total » (M. Mauss) : toutes les dimensions de la société s’y retrouvent, et y sont mobilisées. Michel Onfray affirmait que « manger est un acte politique en même temps que culturel, sociologique, métaphysique, philosophique »; un acte moral, aussi. Car à table, les plats servis sont bons ou mauvais, convoquant dès lors des catégories assignant le contenu de nos assiettes au bien et au mal. Et dans le registre religieux, quelques centaines de millions de catholiques implorent chaque jour le Ciel dans leurs prières, afin qu’Il leur donne « leur pain quotidien »…

La gastronomie en sa Cité pourrait avoir un côté intimidant, tenant nos tables quotidiennes à bonne distance, du haut de sa superbe aristocratique. N’oublions pas que plus largement, la table fait recette, et les Français se révèlent « toqués » de cuisine. Car ce vaste mouvement sociétal aboutissant au couronnement de notre ville traduit une aspiration profonde, exprimée par de plus en plus de personnes : manger mieux, retrouver le temps et le goût de la vraie cuisine, (ré)apprendre à les partager avec famille et amis. Et redécouvrir aussi le formidable potentiel de créativité, de sociabilité paisible, de longévité et de plaisirs dont marmites et fourneaux sont les sésames quotidiens.

Ce que Dijon portera comme message, c’est que cette activité quotidienne – se nourrir - possède en fait une dimension culturelle primordiale. Heureux et judicieux message offert « à la ville et au monde », quand une part importante de notre destin individuel et collectif se lit et se joue au fond de nos assiettes. Celles-ci constituent un creuset identitaire ouvert sur les cultures et les générations, le passé et l’avenir, les autres et les nôtres.