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Femmes écrivaines et femmes lectrices

2021-03
Les femmes sont entrées sur la scène littéraire à la fin du XVIIIe siècle, dès l’avènement du Siècle des Lumières. Elles se sont aussitôt montrées des auteures accomplies, et ont même créé de nombreux courants littéraires (par exemple, Mary Shelley, femme de lettre anglaise, auteur du roman « Frankenstein, ou Prométhée moderne », est considérée comme la fondatrice de la science-fiction).

Et pourtant, pendant longtemps, l'écriture des femmes n’a pas été très appréciée, étant considérée comme l’apanage des hommes. A tel point que l’écrivain française du 19ème siècle Aurore Dupin (devenue baronne Dudevant) portait des vêtements d’hommes et publiait ses œuvres sous le pseudonyme masculin de Georges Sand.

Ce n’est pas parce qu’elle avait peur de se faire critiquer. C'était une sorte de protestation : elle n’aimait pas la position de la femme dans la société, mais personne ne voulait que l’appel au changement vienne de la part d’une femme. Et elle s’est présentée comme un homme et a commencé à écrire des romans sur les femmes capables de changer leur vie et la vie des autres.

Je me souviens avoir lu les romans de George Sand « Consuelo » et « La comtesse Rudolstadt ». Très impressionnée, j’ai réalisé que je voulais et que je pouvais aussi changer moi-même et peut-être changer le monde qui m’entoure !
Au 20ème siècle les femmes conquièrent de plus en plus d’espace dans le monde de la littérature, devenant réputées et reconnues dans certains domaines. Par exemple, Agatha Christie est la reine du roman policier anglais classique. Tout n’étant pas facile pour elle, elle a dû surmonter beaucoup de stéréotypes. Et je m’en suis assurée un jour après avoir lu son autobiographie. Cette lecture m’a aussi inspirée parce que l’écrivaine avait fait face aux épreuves et elle semblait donner de l’espoir aux autres femmes : n’ayez pas peur, vous pouvez le faire aussi !
Au 21ème siècle les écrivaines n’ont plus à trouver des excuses pour leurs créations littéraires. Mais j’ai observé à plusieurs reprises une autre tendance : ce sont les lectrices qui sont gênées et intimidées . Oui-oui ! Beaucoup de femmes aiment lire des romans féminins, mais elles ont honte de reconnaitre leur passion et l’avouer aux autres.

J'ai constaté que mes étudiants se moquent souvent de ceux qui manifestent ouvertement leur passion pour ce genre de littérature. Je pense que parfois ils ont peur de se faire passer, aux yeux de leurs collègues-philologues, pour quelqu’un au mauvais goût esthétique parce que, après tout, la littérature de masse est jugée pour sa standardisation et son infériorité artistique.

Mais je ne suis pas d’accord avec cette opinion sur la littérature de masse (les romans écrits par de femmes en font partie). J’en ai beaucoup lu et je déclare avec certitude : ces romans féminins jouent un rôle très important ! Dans ce genre de littérature nous découvrons des idées, pertinentes pour telles ou telle époque, sur la place de la femme dans la société, sur les opportunités qui s’offrent à elle et les voies pour son développement. Ces livres propagent des idées spécifiques sur ce que la société attend de la femme et ce qu’elle est prête à lui autoriser. Bien sûr, en règle générale dans la littérature de masse, vous trouverez peu de personnages femmes qui enfreignent les interdictions et vont à l’encontre du cours général de la vie. Mais il y a beaucoup de femmes qui sont capables de sentir les humeurs de la société prête aux changements et d’en profiter pour changer leur existence!

Par conséquent, lire la littérature féminine - si votre âme vous le demande - est non seulement possible, c’est voire nécessaire. Elle nous procure une relaxation psychologique et nous nourrit d'énergie positive. C’est un bon soutien pour nos idées et aspirations. Elle permet aussi de se détendre ou de s’amuser en lisant, de se ressourcer et de regarder vers l’avenir avec espoir. Je me souviens d'une des premières expériences de lecture de romans féminins. Je travaillais comme journaliste dans un journal provincial et je me suis retrouvée contrainte de résoudre une question personnelle compliquée : poursuivre mes études et mes recherches pour le doctorat ou devenir une épouse et une mère? Mes copines me dissuadaient de la carrière de chercheuse : tu seras un « bas-bleu », tu ne pourras plus te marier plus tard, tu passeras des soirées solitaires en compagnie d’un chat et de ta thèse de doctorat. Et justement à ce moment-là je suis tombée sur un roman dont l’héroïne se trouvait confrontée au même dilemme. Je l’ai lu et j’ai pris ma décision : je vais poursuivre mes études, ce n'est pas une carrière de chercheuse qui m'empêchera de mener une vie personnelle. Et c’est ce qui arrivé. En plus, c’est au cours de mes études de doctorat, lors d'une conférence scientifique, que j’ai rencontré l’homme qui m'était destiné et qui m'a épousée !

Alors, pour ceux qui veulent découvrir et comprendre l’évolution des idées sur le rôle et la place des femmes dans la société, le roman féminin devient une source précieuse d’informations. Après tout, il est beaucoup plus facile d’emprunter dans la bibliothèque des livres écrits à des époques différentes que de rechercher des journaux de ces année-là, d’écouter des émissions de radio, de regarder des émissions de télévision ou de feuilleter des sites de médias à la recherche de documents appropriés sur une époque quelconque.

Voici une petite liste de recommandations pour ceux qui veulent voir l’évolution de l’image de la femme, ses rôles et ses opportunités dans les romans américains des années 1980, 1990, 2000, 2010 : Sandra Brown « Slow Heat in Heaven» (1988), Susan Elizabeth Phillips « Honey Moon » (1993), Kathryn Stockket « The Help » (2009), Kristin Hannah «The Great Alone» (2018).
Sandra Brown
Kathryn Stockket
Kristin Hannah
Quand les auteures des romans se tournent vers les thèmes du destin, du choix, de la défense, des limites, des envies et des préférences, ils pensent bien sûr à nous, leurs lectrices. Ils cherchent à nous remonter le moral, nous inspirer, nous orienter sur le chemin de la vie et changer nous-mêmes pour le mieux.

Je suis très heureuse que ce genre de littérature existe. Je suis heureuse de pouvoir ouvrir un roman écrit par une femme et pour les femmes aux moments de tristesse ou d’angoisse où j’ai besoin de revivre des sensations romantiques ou bien de trouver une confirmation à mes idées… J’ouvre un livre et je plonge dans le monde de fantaisie. Je reviens après dans la réalité et vis ma vie, mon histoire tout en restant courageusement mon propre auteur.