Salut! Ça va?

Une vie ordinaire d’un magicien extraordinaire

2023-08-03 17:07 2020-12
C’est une histoire triste mais magique : comment un homme solitaire peut devenir très cher et proche pour milliers et voire millions de personnes dans le monde. Cette histoire nous apprend que le bien donné aux autres du fond de cœur ne manquera pas de revenir. Elle dit qu’on peut avoir vécu une vie ordinaire mais quitter ce monde comme un magicien extraordinaire.
Il s’agit de la merveilleuse histoire incroyable de Valery Konstantinovitch Melnikov.

Dessiner et croire
Une équipe de jeunes journalistes de la rédaction du journal régional « Amourskaya Pravda » a fait la connaissance de Valery Melnikov en décembre 2017 grâce à une brève information sur le site du district de Blagovechtchensky. Quelques lignes seulement : « Un retraité Valery Melnikov a recommencé à dessiner une carte de Nouvel An sur la rivière Khomoutina » accompagnées d’une petite photo d’un petit homme en doudoune sur la glace de la rivière. Elles s’y sont bien intéressées et sont parties à la découverte de ce peintre sur glace.

Solitaire, menant une vie plutôt isolée car malentendant, on le connaissait dans le village comme un homme au caractère dur. Les visiteurs ont été prévenues que Valéry peut ne pas leur ouvrir la porte. Mais il leur a ouvert la porte et plus tard il a ouvert son âme et son cœur.

« Il nous a immédiatement invitées à table, il a été très hospitalier, - se souvient la journaliste Anna Dyorova. - Il a raconté sa vie et comment, un jour, il en a perdu le sens. Méningite, coma, accident vasculaire cérébral, surdité, solitude. Après avoir appris son histoire, nos cœurs se sont serrés de pitié. J’ai été frappée par le fait qu’après avoir traversé tant d’épreuves, il aimait toujours la vie. Il ne se plaignait ni de crise dans le pays ni de sa minuscule pension de retraite, ni de l’injustice de son sort... Il oubliait toute la douleur de sa vie, toutes les pertes en faisant de l’art sur glace… Il dessinait une carte de Nouvel An avec de la neige sur la glace de la rivière Khomoutina au bord de laquelle se trouvait son village Markovo, non loin de Blagovechtchensk, à la frontière avec la Chine. Cette occupation l’a sauvé de la solitude et lui a donné l’espoir qu’il ne vivait pas en vain ».

« J’ai survécu pour créer de belles choses » - cette publication dans « Amourskaya Pravda » a bouleversé la vie tranquille et discrète de Valery. Il peignait sur la glace depuis cinq ans, offrant du bonheur à ses voisins dans le village et aux automobilistes inconnus passant sur le pont au-dessus de Khomoutina. Et après la parution de cet article il s’est réveillé célèbre. Par contre, lui, il ne le savait pas encore. La rédaction du journal fut la première à s’en rendre compte lorsque des dizaines, puis des centaines de lecteurs de différentes régions du pays ont laissé leurs commentaires dans le compte Instagram de « Amourskaya Pravda » : « Magicien », « Père Noël de l’Amour », « Merci pour ce conte de fée »… Plus tard des messages arrivaient en très grand nombre: « Je veux envoyer un colisà deduchka (grand-père affectueusement) pour le Nouvel An ! »

Ainsi, à la demande des lecteurs, la rédaction a lancé un appel à l’action « Souhaitons Bonne Année au grand-père Valéry ! » Et ça a commencé ! Elena Pavlova, la rédactrice en chef du journal « Amourskaya Pravda » raconte : « Je recevais des dizaines de virements par jour sur ma carte bancaire avec commentaires « Salutations de Baïkal », « Un cadeau de Vyborg », « Au grand-père Valery de Moscou » - les Russes de quatre coins du pays confiaient leur argent pour faire un cadeau à un artiste lointain de l’Amour. On a reçu 43 710 roubles comme cadeau. Des gens de bon cœur qui avaient vu sa création de glace et de neige, ont ressenti sa solitude, et ont voulu partager un peu de chaleur de leurs âmes avec Valery. C’était si merveilleux, c’était comme un conte ! »

Quelques jours plus tard, le bureau de poste du village Markovo a reçu un nombre record de lettres et de cartes postales adressées à une seule personne – Valery Melnikov. Les gens les plus attentionnées lui ont expédié des colis avec des chaussettes chaudes ou des chocolats.

Le bonheur existe !

La veille du Nouvel An, la rédaction de « Amourskaya Pravda » a rendu visite chez l’artiste de neige. Il ne s’attendait pas à cette visite. Sans internet, malentendant, il ne pouvait même pas supposer que des milliers de personnes en Russie pensaient à lui ces derniers jours, et il ne pouvait même pas s’attendre au cadeau que ses compatriotes lui avaient préparé. Un réfrigérateur, des sacs remplis des produits pour la fête, un pull a flocons de neige – tout comme ceux qu’il dessinait sur la glace de Khomoutina, une nouvelle pelle décorée d’un nœud rouge comme un cadeau précieux – son outil pour faire de l’art sur glace.

Mais le plus grand cadeau pour Valéry, une personne solitaire, était la visite de ces jeunes femmes.

« Je ne dirais pas que j’étais heureux dans la vie. Mais aujourd’hui je suis heureux ! » a avoué Valery Konstantinovitch. Peut-être pour la première fois depuis de longues années il a oublié sa solitude ?

« Bouleversé par les émotions, il s’est même agenouillé devant nous en faisant des gestes de prière et en répétant sans cesse « merci, merci, merci » - se souvient Elena Pavlova. « Et puis il nous a régalées de pommes de terre cuites, de crêpes savoureuses, de choucroute, de concombres et de tomates marinés. Il était prêt à nous donner tout ce qu’il avait. Et c’était justement tout ce qu’il avait.

Quand il a fait bouillir de l’eau dans sa petite bouilloire en fer, tout ému et préoccupé, il a commencé, à sortir de vieilles tasses soviétiques des étagères éloignées. Et soudain, il a avoué : « Je n’ai jamais eu autant d’invités ». Nous étions cinq. Et c’est alors, peut-être que nous avons compris : ce n’était pas seulement une histoire de Nouvel An, c’était la vraie vie. Sa vie. Nous n’avions pas le droit tout simplement publier un article sur cet homme et l'oublier. Et nous n'avons pas oublié ».

De petits bouts de cœur venant de quatre coins du monde

Valery Melnikov a reçu des lettres non seulement de tout le pays, mais aussi de nos compatriotes de France, d’Italie, de Nouvelle-Zélande, d’Écosse et des États-Unis.

« Je vous remercie du fond du cœur pour ce que vous faites. Je rêve que mon fils ait un grand-père comme vous » ... « Nous vivons au Tatarstan, nous avons vu votre carte postale sur la glace de la rivière – c’est incroyable ! Merci de la part de tous les habitants de notre pays ! C’est tellement merveilleux de créer quelque chose tout simplement juste pour la joie des gens. Vous êtes une personne unique avec un bon cœur » ... « Je vous admire ! Vous êtes un exemple pour ceux qui ont perdu l’espoir » … « Que Dieu vous bénisse ! La Russie tient vraiment grâce à des personnes comme vous, vous faites la richesse de notre pays ».

Il lisait toutes les lettres, intimidé, en cachant ses larmes et ne faisait que répéter « tout ça c’est pour moi ? Vraiment ? » Et à la question « Est-ce que vous croyez maintenant aux miracles ? » il a répondu « Je crois maintenant à l’être humain ».

Les journalistes de « Amourskaya Pravda » sont devenus amis avec Valery Melnikov, ils lui rendaient visite la veille du Nouvel An et le jour de son anniversaire. Très sincèrement, ils sont devenus bien proches…

«Il me semble que ces dernières années, Valery Konstantinovitch a aimé les fêtes. Au moins le Nouvel An et son anniversaire. Lorsque nous nous réunissions dans sa petite maison calme et d’habitude vide. Notre grand-père, ces jours-là laissait même la porte ouverte en toute confiance, pour que les invités ne frappent pas en vain, car il ne les entendait pas. Il nous attendait en préparant un grand repas dans la cuisine », raconte Anna Chantyka, la journaliste de la chaine de télévision régionale « Amour ». « Il cuisinait des pommes de terre avec des oignons, des crêpes, des « draniki », ouvrait des pots de conserve avec des cornichons et des confitures. Il était tellement hospitalier et généreux ! Il nous embrassait à l’entrée, heureux. Et puis il courrait se changer, mettre une tenue de fête. Il lisait à haute voix des lettres arrivées du monde entier et les serrait contre son cœur. Nous nous connaissions déjà depuis trois ans, et communiquer avec lui n’était plus compliqué : il a appris à lire des phrases simples sur les lèvres ».

« Notre cher magicien, guéris-toi vite, s’il te plait ! »

En novembre dernier les amies de Valery Konstantinovitch allaient lui rendre visite pour discuter ce qu’il se préparait à dessiner cette année sur la glace et lui demander s’il a besoin de quelque chose. Un coup de téléphone a tout changé : Valéry Konstantinovitch est à l’hôpital atteint du coronavirus. « Nous étions inquiètes, mais nous étions sûres qu’il va certainement s'en sortir, puisque c’est un magicien », avoue Elena Pavlova. Entre-temps, dans les réseaux sociaux d’« Amourskaya Pravda » les gens envoyaient des encouragements :

« Valery Konstantinovitch, un jour vous avez créé un vrai miracle de vos propres mains ! Tout sera bien ! Que Dieu vous accorde un prompt rétablissement et une longue vie », « Que Dieu protège le grand-père Valéry et qu’il se rétablisse au plus vite ! » « Pour beaucoup de gens qui n’ont plus de grand-père, il est devenu comme membre de famille » … « Nous croyons aux miracles, nous voulons vraiment cette année encore voir votre fameuse carte postale ! » « Tout ira bien, parce que chaque conte de fées à une fin heureuse ! »

Les messages les plus chaleureux ont été publiés et les journalistes voulaient transmettre ce numéro du journal à l’hôpital, à Valery Konstantinovitch. Mais un autre coup de téléphone a frappé fort : le bon cœur du magicien s’est arrêté de battre le 30 octobre à 22h45. Les médecins ont fait tout le possible pour le sauver…

La carte de Nouvel An la plus connue en Russie

Quelques jours après la cérémonie d’adieu, les amis de Valéry Konstantinovich Melnikov ont eu l’idée de réaliser le vœu de tous les compatriotes qui connaissaient l’artiste de glace : créer une carte de Nouvel An sur la glace de la rivière Khomutina comme le faisait tous les ans le grand-père Valery, en sa mémoire, en son honneur. Pour que vive le miracle de Nouvel An auquel les gens ont cru grâce au magicien grand-père Valery.

L’artiste-sculpteur Alexey Smirnov, pompier de métier, a créé une carte de neige et de glace devenue la plus célèbre carte de Nouvel An en Russie. Vous y voyez un Ded Moroz (Père Noel) marchant, une pelle à la main, et vous lisez « En mémoire au grand-père Valery ». La photo de cette carte sur glace a fait le tour du pays en quelques minutes. Des journaux et des chaînes de télé russes (Moscou, Saint-Pétersbourg, Samara, Astrakhan, Tomsk, Sébastopol, etc.) ont raconté l’histoire de notre magicien Valery. Les gens avouaient : « Je pleure … Merci beaucoup pour cette histoire qui nous parle du grand cœur, de l’âme généreuse, de la bonté humaine ! » … « Que c’est touchant ! Que c’est bien que cet homme ait vécu parmi nous ! Merci à lui ! Merci à vous que vous ne l’oubliiez pas ! » … « De gens étonnants habitent dans notre pays ! » … « C’était un homme a un cœur d’or ! Qu’il y ait plus de gens comme lui, sincères et bons. Il faut que sa mémoire vive toujours ! »

Le grand-père Valery n’est plus parmi nous mais il continue de faire fondre les cœurs humains et sa mémoire vit toujours aux bords de sa rivière bien-aimée Khomutina et dans les âmes des gens.

Des merveilles sur la glace
La carte de Nouvel An en mémoire de Valery Melnikov a fait un tour du monde en faisant pleurer les gens et les faisant croire aux miracles. Alors, la rédaction de « Amourskaya Pravda » convaincue que nous sommes tous capables de créer des merveilles a annoncé un concours de cartes de neige et de glace.

Pour l’instant il y a déjà 93 cartes crées par les habitants de la région Amourskaya ! Malgré le froid parfois extrême (jusqu’à -30-35C au nord) de bons cœurs sortaient sur la glace des fleuves et rivières à leur proximité pour envoyer vers le ciel froid d’hiver toute leur reconnaissance au grand-père Valery de les avoir fait croire aux miracles et à la bonté humaine.

Source utilisée : ampravda.ru
Photos : Amourskaya Pravda