Comme le dit la célèbre chanson de Lucien Boyer « Le béret » : « Chaque pays possède sa coiffure… » et pour la France, c’est bien sûr le béret ! Cet objet mythique, qui fait partie de notre culture et de notre quotidien béarnais, est aujourd’hui fabriqué au pied des Pyrénées, dans la dernière usine historique française, la Maison LAULHERE à Oloron Sainte Marie, et ce depuis 1840.
Petite histoire du béret basque Il a été inventé par les bergers qui le tricotaient en gardant leurs troupeaux dans la Vallée d’Ossau au pied des Pyrénées. Comme en attestent écrits et bas‐reliefs du moyen‐âge, les bergers ont eu l’idée de tricoter cette galette avec la laine de leurs moutons à l’aide de longues aiguilles de buis. Une fois lavé, martelé et feutré dans l’eau des gaves, longuement étiré sur le genou, ils obtenaient ce couvre‐chef qui les protégeait des caprices du temps sur les estives pyrénéennes. Les premiers bérets qui ont été fabriqués étaient marrons, on le retrouve sur les gravures, les estampes et les tableaux anciens. Puis sont venus les pigments qui ont apporté le bleu et le noir.
L’épopée du béret basque C’est, selon la légende, l’empereur Napoléon III qui séjournait régulièrement à Biarritz pour surveiller la construction de son palais d’été, qui remarqua cettecoiffe portée par les habitants de la région et la baptisa « béret basque ». Il est en tous cas indubitable que les Basques, marins et grands voyageurs aux quatre coins du monde, ont contribué à la diffusion du béret dans le monde et sur le continent américain en particulier. Au cours du XIXème siècle, des milliers de Béarnais et de Basques ont dû quitter leur cher pays pour les Amériques, du Nord ou du Sud. De New-York à San Francisco, de Montevideo à Buenos-Aires, ils se sont installés et leurs descendants aujourd’hui, fiers de leurs racines, portent toujours le béret.
Du berger au soldat, au paysan et a l’ouvrier Les qualités intrinsèques du béret, à la fois imperméable, respirant, extrêmement résistant, facile à plier et à ranger dans sa poche, en font un couvre‐chef pratique pour les militaires, paysans et ouvriers qui travaillent à l’extérieur. Avec la révolution industrielle et le début de l’exode rural, il investit les villes et sa fabrication elle aussi s’industrialise : les métiers à tricoter apparaissent dans les premières manufactures du Béarn, où l’on comptera la plus forte densité de fabricants avec un point culminant dans les années 1960. Deux villes du Béarn se sont partagées la fabrication du béret, il s'agit de Nay et d’Oloron-Sainte-Marie. Des milliers de personnes travaillaient dans les usines de textiles de ces deux villes jusqu'au début des années 1960. Aujourd'hui, il ne reste plus qu'une fabrique, à Oloron qui fournit notamment la plupart des bérets militaires de plusieurs dizaines de pays.
Noir, bleu, marron Les Béarnais ont chacun trois bérets chez eux. Le petit noir qu’ils gardent toute la semaine s’appelle le « béret de travail ». Celui-là sert à tous, à transporter des cerises ou à donner un coup dans les jambes des enfants désobéissants ! Le deuxième est un élégant béret bleu, réservé aux cérémonies religieuses du dimanche, mais aussi aux fêtes et aux enterrements. Le troisième est marron, les Béarnais ne le portent que trois fois dans l'année, à Pâques, le 15 août (fête de la Vierge) et à Noël.
Comment le porter ? Enfoncé jusqu’aux oreilles, incliné sur le côté façon chasseur alpin, tiré vers l’avant pour former une visière, ou encore vers l’arrière comme pour une casquette à l’envers ? Il y a mille et une façons de le placer sur la tête, de lui donner une forme, de l’incliner pour l’accorder à une humeur et à un look, et en changer tous les jours...
Pour les Basques, la position du béret sur la tête indique souvent l'humeur de celui qui le porte. Si vous croisez quelqu'un qui porte le béret bien sur les yeux, méfiez-vous, c'est synonyme de mauvaise humeur, celui-là ne veut parler à personne. Quand il glisse d’une oreille à l'autre, la personne réfléchit, s'interroge. Quand il est tout à fait en arrière de la tête, c’est l'homme heureux qui se fiche du tiers comme du quart ! En cas de coup dur, le béret peut devenir une arme défensive ou peut aussi servir à attraper un oiseau, il suffit de glisser un caillou dedans et de le faire tourner avant de le projeter vers la cible. Utile n'est-ce pas ?
Révolutionnaire et glamour, militaire et rebelle, prolétaire et artiste Alors que le béret s’exporte et se diffuse dans toutes les couches de la société, il devient l’emblème de mouvements et de personnalités aussi diverses que le Che et la révolution cubaine, le cinéma des années 50 et 60 avec des ambassadrices comme Michèle Morgan, Brigitte Bardot ou Marylin Monroe, ou encore des musiciens comme John Lennon ou Dizzy Gillespie. Plus récemment, on l’a vu porté à nouveau au‐devant de la scène sur les podiums des défilés de grands couturiers mais aussi par des personnalités du monde du 7° art.
Savez-vous…
Comment nomme‐t‐on la petite «queue» présente au sommet du béret ? Elle est appelée cabillou, cabilhou, coudic ou encore coudète (petite queue en Gascon)
Quelle est la matière première utilisée pour confectionner les véritables bérets traditionnels ? La laine Mérinos cardée, une fibre aux propriétés exceptionnelles qui une fois tricotée, feutrée et travaillée produit une étoffe à la fois dense, souple, chaude en hiver et respirante en été. Et bien sûr, imperméable.
Combien de mètres de fil de laine sont‐ils nécessaires pour fabriquer un béret ? Environ 700 mètres sont utilisés pour réaliser un béret traditionnel.
Combien de temps faut‐il pour fabriquer un béret ? La fabrication d’un béret nécessite 12 heures de travail en cumulé, échelonnées sur 2 à 3 jours selon le modèle. Un béret passe entre les mains de 20 personnes au cours de sa fabrication, depuis la réception des bobines de laine jusqu’à l’expédition !
Le chansonnier Lucien Boyer écrit en 1924 les paroles et la musique de « Le Béret, chanson de Gascogne ». Cette chanson connaît un succès considérable à partir de 1931 avec sa création par Perchicot. D’autres chanteurs la reprendront plus tard, comme André Dassary. Si les paroles témoignent de l’actualité de l’époque comme l’allusion à Alphonse XIII, à la guerre de 1914-1918 (« nos petits gars qui portaient le béret »), la chanson a gardé une valeur symbolique puissante pour tous les amateurs du béret.
Le béret Chaque pays possède sa coiffure Le marocain porte un fez rigolo Le mexicain ne manque pas d'allure En arborant son vaste sombrero Le bon bourgeois, ce n'est pas un reproche Met un melon, tant mieux si ça lui plaît Moi, mon chapeau, je le mets dans ma poche Je suis gascon et porte le béret Notre béret, c'est toute la Gascogne Et per canta noste bet seoul de Pau Nos montagnards aux jambes de cigogne Avec orgueil le portent coum'ataou ! Et avec ça c'est tellement pratique Quand m'soeur l'curé sur la route apparaît Où le paysan dépose-t-il sa chique ? Hé, Diou bibant, mais c'est dans son béret ! Le béarnais aime le mettre en pointe Le basque lui le met sur l'occiput Et le landais sans reproche et sans crainte Le pose ainsi quand il veut dire “zut” ! C'est tout petit mais c'est une merveille Pour réfléchir, c'est ainsi qu'on le met Et pour crâner on le met sur l'oreille Quel orateur, ce cochon de béret! Quand grand papa travaille dans la vigne Et qu'à l'église on sonne tant et plus Pour la prière il l'enlève et se signe Plus de béret quand sonne l’Angélus Les parisiens dont l'enfant n'est pas sage Pour le fesser prennent un martinet Un martinet c'est un truc de sauvage Nous, on lui flanque un bon coup de béret ! Lorsqu’à Bayonne on joue à la pelote C'est son béret que l'on jette au vainqueur Et ce béret, ce n'est pas d'la gnognote Puisque dedans on a mis tout son cœur Et le dimanche il est bon que l'on sache A la plaza, ça fait beaucoup d'effet Nos jeunes gens vont exciter la vache Pour la sauter pieds joints dans le béret ! Notre béret a fait le tour du monde Tous les champions qui battent un record L'ont adopté sur la terre et sur l'onde Car un béret, ça tient, coquin de sort ! Malgré le vent et malgré le cyclone Il est solide et peut être qui sait ? Alphonse treize aurait gardé son trône S'il avait eu pour couronne un béret ! Quand le conscrit quitte sa fiancée C'est le béret qui rythme les adieux Quand il est loin seul avec sa pensée C'est au béret qu'il parle... avec les yeux ! Je ne veux pas vous raconter la guerre Quelque grincheux me le reprocherait Mais vous savez tout ce qu'ils ont pu faire Les petits gars qui portaient le béret ! 1924